Je n’ai pas eu de coup de foudre pour Istanbul, je veux dire, pas comme j'ai déjà pu m’emballer au premier regard pour une ville, m'y projeter jusqu'à y envisager un autre schéma de vie. Il a fallu s’apprivoiser mutuellement, et
progressivement, Istanbul s’est emparé de moi, à-bras-le-corps.
Istanbul a été pour moi un dépaysement, un télescopage de
cultures, un suffoquement et une bouffée d’air. Une décharge électrique, un
choc à 500. À 1000. Tout cela à la fois et beaucoup plus encore. Cela a été un
monde.
Je m’imaginais Byzance, Constantinople, les ciels qui
rougeoient et les couchers de soleil multicolores, les dômes des palais qui
scintillent. Et c’est vrai que les ciels ont rougeoyé, que les couchers de
Soleil sur les eaux du Bosphore m’ont offert des spectacles merveilleux. Que
les palais m’ont submergée de leur somptuosité et de leurs apparats. Les cartes
postales ne mentaient pas, elles restent même encore en deça de la beauté de la
Vieille ville.
Mais j’avais sous-estimé toute la richesse qu’Istanbul avait
à m’offrir en plus de tout cela, dans ses plis, ses replis, ses balbutiements
et ses défauts, pourquoi pas.
Un soir, dans la chambre de notre appartement, j’ai lu dans
un de mes guides de voyage que beaucoup de touristes choisissaient de passer
l’intégralité de leur séjour dans le vieil Istanbul, le quartier de
Sultanahmet, celui des palais, celui de l'Histoire. J’avais, à ce moment-là, été déjà tellement
déboussolée par la folle diversité de caractères des quartiers d’Istanbul, que
cela m’a un peu attristée, sur le coup.
Alors voilà, Istanbul, j’ai aimé tes mille visages.
L’artisanat de Cukurcuma et Cihangir
J’ai aimé les petites boutiques de ces deux quartiers
voisins, abondant d’antiquités où le kitsch et le toc cotoient la véritable
pièce d’époque au milieu d’un fouillis sans nom de chiffons, tapis et
pampilles.
Cela m’a fait un bien fou de plonger dans les échoppes des petits
artisans du quartier, loin du matraquage touristique des grandes artères et de
leurs magasins tous semblables. Ici, j’ai apprécié le calme, la vie de quartier et les murs vrombissant de couleurs au détour d’une rue.
L’effervescence de Kadikoy
À la descente du vapur (bateau) qui m’a menée à Kadikoy, sur
la rive asiatique d’Istanbul, j’ai marqué un temps, pour cette première fois en
Asie qui semblait couler de source, aussi simple qu’une courte traversée en
bateau, sans changer de ville. Quelques jours après, j’ai réalisé que j’avais
fait mes vrais premiers pas en Asie sans le savoir, en atterrissant tout simplement à l’aéroport de
Sabiha Gökçen, également située sur la rive asiatique.
J’ai beaucoup apprécié
le quartier de Kadikoy, c’est là, je crois, que j’ai pris la pleine mesure de
la plaque tournante qu’est Istanbul, carrefour entre l’Europe et l’Orient,
entre l’hyper occidentalisation et la fière défense des traditions. Synthèse,
surtout, de toutes ces richesses.
J’ai arpenté le marché de Kadikoy, ses étals de fruits et de
légumes beaux comme jamais je n’en ai vus, ses notes entêtantes d’épices et de
parfums maritimes, ses vendeurs toujours enclins à attirer notre attention,
demander d’où nous venons ("Hi ladies, where are you from?"), pour engager la conversation le sourire à
l’oeil.
Ce que
j’ai aimé à Beyoglü, c’est le fourmillement, ce sont les innombrables veines irrigant
sa grosse artère principale, l’avenue Istiklal. Je ne l’ai vue franchement
apaisée qu’à 6 heures du matin, le jour de mon départ. Le reste du temps, il
m’a semblé y voir les quatorze millions d’habitants d’Istanbul déambuler de
concert dans cette unique rue, constamment noire de monde, ahurissante et
bruyante.
Jusqu'ici, tout va bien...
Au musée Istanbul Modern, la très belle exposition temporaire Plurivocality, entre sons et lumières.
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